Marseille, confrontée à un défi majeur en matière de mobilité, affiche un taux de congestion routière parmi les plus élevés de France. Les embouteillages chroniques pèsent lourdement sur l'économie locale et la qualité de vie de ses habitants. En 2022, les Marseillais ont perdu en moyenne 76 heures dans les embouteillages, générant des coûts économiques considérables et contribuant à la pollution atmosphérique [1] .
Dans un contexte où l'idéal de la "ville à 15 minutes" peine à se concrétiser, repenser les modes de déplacement est une nécessité impérieuse pour Marseille et son agglomération. Face à cette urgence, le projet de RER Marseillais, un réseau de type S-Bahn allemand, se présente comme une solution ambitieuse et structurante.
L'urgence de repenser la mobilité à marseille
Deuxième ville de France, Marseille présente une configuration géographique particulière, caractérisée par des vallées, des massifs et un étalement urbain important. Cette complexité géographique rend les déplacements difficiles et contribue à la saturation des axes routiers. Les infrastructures de transport existantes, composées du métro, du tramway, des bus et des TER actuels, montrent leurs limites face à la croissance démographique et aux enjeux de mobilité durable.
La saturation des axes routiers engendre des problèmes de congestion, des difficultés d'accès aux zones périurbaines et un impact environnemental négatif, avec une pollution atmosphérique préoccupante et des émissions de gaz à effet de serre en constante augmentation. De plus, la difficulté de se déplacer pour certains accentue la fracture sociale et limite l'accès à l'emploi, aux services et aux loisirs. Selon l'INSEE, près de 15% des ménages marseillais ne possèdent pas de voiture [2] , rendant l'accès aux transports en commun d'autant plus crucial.
Le projet de RER Marseillais, ou Réseau Express Régional, vise à créer un réseau de transport en commun performant, capable de répondre aux besoins croissants de mobilité des habitants de Marseille et de sa région. Un RER se distingue par sa capacité à transporter un grand nombre de voyageurs, sa fréquence élevée et sa rapidité, offrant ainsi une alternative attractive à la voiture individuelle.
Ce projet d'envergure, impliquant la région Sud, la Métropole Aix-Marseille-Provence et la SNCF, ambitionne de transformer en profondeur les déplacements dans la région. Bien que le calendrier prévisionnel soit encore en cours d'élaboration, l'importance du RER pour l'avenir de la mobilité durable dans la région est indéniable.
Le projet de RER marseillais : déploiement et caractéristiques techniques
Le projet de RER Marseillais prévoit la création d'un réseau de lignes interconnectées, desservant les principales gares de l'agglomération et offrant des correspondances avec les autres modes de transport en commun. L'objectif est de créer un maillage performant, permettant de se déplacer facilement et rapidement d'un point à l'autre de la région.
Les lignes et le maillage prévu
Le réseau envisagé comprendra plusieurs lignes, identifiées par des numéros ou des appellations provisoires, reliant les principaux pôles urbains de la région. Ces lignes desserviront des gares existantes modernisées et de nouvelles gares, offrant une accessibilité optimale aux personnes à mobilité réduite. L'intermodalité sera un élément clé du projet, avec des connexions facilitées avec le métro, le tramway, les bus et les gares TER actuelles. Des études sont en cours pour optimiser le tracé des lignes et les correspondances [3] .
- Ligne 1 (Littoral) : Marseille-Saint-Charles – Miramas, desservant les villes de Vitrolles et Marignane.
- Ligne 2 (Étoile) : Marseille-Saint-Charles – Aubagne – Aix-en-Provence, améliorant l'accès à la technopole de l'Arbois.
- Ligne 3 (Nord) : Marseille-Saint-Charles – Gardanne – Pertuis, favorisant les liaisons avec le pays d'Aix.
Imaginez des gares modernes, conçues pour faciliter les déplacements et offrir un environnement agréable aux voyageurs. Ces gares seront équipées de services tels que des espaces d'attente confortables, des bornes d'information multimodales, des commerces de proximité et des accès adaptés aux personnes à mobilité réduite. L'objectif est de créer des lieux de vie attractifs, favorisant l'utilisation des transports en commun et s'intégrant harmonieusement dans le paysage urbain. L'accessibilité universelle est une priorité, avec des quais adaptés, des ascenseurs et des systèmes d'aide à l'orientation.
Aspects techniques
Le RER Marseillais utilisera du matériel roulant moderne, conçu pour assurer le confort et la sécurité des voyageurs. Les trains seront spacieux, climatisés et équipés de prises électriques et de bornes Wi-Fi. L'accessibilité sera une priorité, avec des aménagements spécifiques pour les personnes à mobilité réduite, les familles avec enfants et les personnes âgées. La région Sud privilégie l'acquisition de trains à faibles émissions, contribuant ainsi à la réduction de l'empreinte carbone du réseau [4] .
L'infrastructure ferroviaire sera modernisée pour permettre une circulation fluide et rapide des trains. Les travaux comprendront l'électrification des lignes, le doublement des voies et l'installation d'une signalisation moderne de type ERTMS (European Rail Traffic Management System). Ces améliorations permettront d'augmenter la fréquence des trains et de réduire les temps de trajet, tout en garantissant un niveau de sécurité optimal. L'adaptation des infrastructures existantes est un défi technique majeur, nécessitant une planification minutieuse et une coordination étroite entre les différents acteurs.
La fréquence des trains sera un élément déterminant du succès du RER Marseillais. L'objectif est de proposer un train toutes les 15 à 30 minutes en heure de pointe sur les principales lignes, offrant ainsi une alternative attractive à la voiture individuelle. Les temps de trajet seront également réduits, permettant de se déplacer rapidement entre les principales gares de la région. Par exemple, un trajet entre Marseille-Saint-Charles et Aix-en-Provence pourrait être réduit à environ 35 minutes.
Le RER d'Île-de-France transporte quotidiennement plus de 3 millions de voyageurs, tandis que le RER Lyonnais, plus récent, connaît une croissance constante de sa fréquentation. Le RER Marseillais, bien que plus modeste dans sa phase initiale, ambitionne de s'inscrire dans cette dynamique, en offrant un service de transport performant et adapté aux besoins de la région et en répondant aux enjeux de mobilité durable.
Calendrier et financement
Le projet de RER Marseillais est un projet de longue haleine, dont la réalisation s'échelonnera sur plusieurs années. Les premières études de faisabilité ont débuté en 2021, et les premières mises en service sont envisagées à l'horizon 2027-2030 [5] . Les phases de planification, d'études d'impact environnemental et de travaux nécessiteront un investissement important et une coordination étroite entre les différents acteurs impliqués.
Les sources de financement du projet proviendront de la région Sud, de la Métropole Aix-Marseille-Provence, de l'État (à travers notamment le plan France Relance) et de l'Union Européenne (via des fonds structurels). Le coût total du projet est estimé à plusieurs milliards d'euros, et les financements seront répartis entre les différents partenaires, en fonction de leurs compétences et de leurs engagements. La région Sud a déjà annoncé un investissement de 500 millions d'euros pour la modernisation des infrastructures ferroviaires [6] .
La concertation publique jouera un rôle essentiel dans la réussite du projet. Les habitants seront invités à s'exprimer sur les différentes options et à faire part de leurs préoccupations lors de réunions publiques et d'enquêtes en ligne. L'adhésion des citoyens est indispensable pour garantir l'acceptation du projet, son intégration harmonieuse dans le tissu urbain et son appropriation par les usagers. La transparence et la communication seront essentielles tout au long du projet.
Les bénéfices attendus du RER marseillais : un impact multidimensionnel
Le RER Marseillais est porteur de nombreux bénéfices, qui se traduiront par une amélioration de la mobilité, un impact environnemental positif et un développement économique et social durable. Ce projet ambitieux transformera en profondeur la vie des habitants de Marseille et de sa région.
Amélioration de la mobilité
La mise en service du RER Marseillais entraînera une réduction significative de la congestion routière. Des simulations estiment qu'à terme, le RER pourrait retirer jusqu'à 50 000 voitures des routes chaque jour, grâce à l'attractivité du nouveau réseau de transport en commun [7] . Cela se traduira par une fluidification du trafic, une diminution des temps de trajet et une amélioration de la qualité de l'air.
Le RER facilitera les déplacements domicile-travail, en offrant une alternative rapide, fiable et confortable à la voiture individuelle. Par exemple, un habitant d'Aubagne travaillant à Marseille-Saint-Charles pourrait gagner jusqu'à 30 minutes sur son trajet quotidien, grâce à des correspondances optimisées et une fréquence élevée des trains. Ce gain de temps précieux améliorera la qualité de vie des travailleurs et renforcera l'attractivité de la région.
Le RER désenclavera les quartiers périphériques et les zones rurales, en offrant un accès facile et rapide aux services, aux emplois et aux loisirs. Les habitants de ces zones pourront ainsi bénéficier des mêmes opportunités que les habitants du centre-ville, contribuant à réduire les inégalités sociales et territoriales. Le RER favorisera également le développement du tourisme dans les zones rurales, en facilitant l'accès aux sites naturels et culturels.
Impact environnemental
Le RER Marseillais contribuera à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à améliorer la qualité de l'air. En encourageant l'utilisation des transports en commun, le projet permettra de diminuer le nombre de voitures en circulation et de limiter la pollution atmosphérique. On estime que le RER pourrait réduire les émissions de CO2 de plusieurs milliers de tonnes par an. La région Sud s'est fixé des objectifs ambitieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et le RER est un outil essentiel pour atteindre ces objectifs [8] .
Le projet favorisera également le développement des modes de transport doux, tels que le vélo et la marche à pied. Des pistes cyclables et des zones piétonnes seront aménagées autour des gares, encourageant les voyageurs à combiner différents modes de transport pour leurs déplacements quotidiens. Des parkings vélos sécurisés seront également mis à disposition dans les gares.
En limitant l'étalement urbain et la consommation d'espaces naturels, le RER contribuera à préserver l'environnement et à protéger la biodiversité. Le projet s'inscrit dans une démarche de développement durable, visant à concilier les besoins de mobilité avec la protection de l'environnement et la valorisation du patrimoine naturel et culturel. La prise en compte des enjeux environnementaux est une priorité tout au long du projet.
Développement économique et social
La construction et l'exploitation du RER Marseillais créeront de nombreux emplois, contribuant à dynamiser l'économie locale. Des milliers d'emplois seront créés pendant la phase de construction (ingénieurs, techniciens, ouvriers du bâtiment), et des centaines d'emplois pérennes seront créés pendant la phase d'exploitation (conducteurs, agents de maintenance, agents d'accueil). La région Sud s'engage à favoriser l'emploi local et la formation professionnelle dans le cadre du projet [9] .
Le RER renforcera l'attractivité du territoire, en facilitant les déplacements et en améliorant la qualité de vie. Les entreprises seront plus enclines à s'implanter dans la région, attirant de nouveaux talents et créant de nouvelles opportunités d'emploi. Le tourisme sera également stimulé, grâce à un accès plus facile aux sites touristiques et aux événements culturels. Le RER contribuera à renforcer l'image de Marseille et de sa région comme une destination attractive et dynamique.
Le RER contribuera à lutter contre les inégalités sociales, en améliorant l'accès à l'emploi et aux services pour les populations les plus vulnérables. Les personnes sans voiture ou disposant de faibles revenus pourront ainsi se déplacer plus facilement et accéder aux mêmes opportunités que les autres habitants de la région. Des tarifs sociaux seront mis en place pour faciliter l'accès au RER pour les personnes en difficulté. L'insertion professionnelle et l'accès aux services publics sont des priorités.
Les défis et les controverses du projet
Si le projet de RER Marseillais est porteur de nombreux espoirs, il est également confronté à des défis importants et suscite des controverses qu'il convient d'examiner. La complexité des travaux, les contraintes financières et les préoccupations environnementales sont autant d'éléments à considérer pour garantir le succès du projet.
Les défis techniques
La complexité des travaux constitue un défi majeur pour la réalisation du RER Marseillais. Les contraintes géographiques, telles que les vallées et les massifs, rendent les travaux difficiles et coûteux. La cohabitation avec les infrastructures existantes, telles que le métro et les voies ferrées, nécessite une coordination étroite et une planification minutieuse. Les travaux pourraient engendrer des nuisances pour les riverains, telles que le bruit et les perturbations de la circulation. La mise en place de mesures d'atténuation et une communication transparente avec les riverains sont indispensables.
La gestion des flux de voyageurs est un autre défi important. Il est essentiel d'assurer une bonne gestion des flux dans les gares et les correspondances, afin d'éviter les engorgements et de garantir la fluidité des déplacements. Des systèmes d'information performants et une signalétique claire sont indispensables pour guider les voyageurs et faciliter leurs déplacements. L'utilisation de technologies innovantes, telles que des applications mobiles et des bornes interactives, pourrait améliorer l'expérience utilisateur.
La sécurité des voyageurs et des infrastructures est une priorité absolue. Des mesures de sécurité renforcées doivent être mises en place pour prévenir les accidents et les actes de malveillance. Des équipes de sécurité qualifiées doivent être présentes dans les gares et à bord des trains, afin d'assurer la sécurité des voyageurs et de répondre aux éventuelles situations d'urgence. La vidéosurveillance et le contrôle d'accès sont des éléments essentiels du dispositif de sécurité.
Les défis financiers
La maîtrise des coûts est un défi majeur pour la réalisation du RER Marseillais. Il est essentiel d'éviter les dépassements budgétaires et d'optimiser les dépenses, afin de garantir la viabilité financière du projet. Une gestion rigoureuse des finances publiques et une coordination étroite entre les différents partenaires sont indispensables pour maîtriser les coûts. La recherche de financements européens et la mise en place de partenariats public-privé pourraient compléter les financements publics.
La répartition des financements entre la région, la métropole, l'État et l'Europe doit être équitable et transparente. Chaque partenaire doit assumer sa part de responsabilité et contribuer au financement du projet en fonction de ses compétences et de ses engagements. Des accords de financement pluriannuels sont nécessaires pour assurer la pérennité du projet et la visibilité financière à long terme.
La rentabilité du projet à long terme doit être assurée. Il est essentiel de réaliser des études de marché approfondies et d'anticiper les besoins futurs en matière de mobilité, afin de garantir l'attractivité du RER et sa pérennité financière. La mise en place d'une tarification attractive et l'intégration du RER dans une offre de transport multimodale sont des éléments clés pour assurer la rentabilité du projet.
Les controverses
L'impact du projet sur l'environnement suscite des préoccupations. La construction de nouvelles infrastructures peut entraîner la destruction de certains espaces naturels et la fragmentation des habitats. Des mesures de compensation doivent être mises en place pour minimiser l'impact sur l'environnement et protéger la biodiversité. La réalisation d'études d'impact environnemental approfondies et la mise en place de mesures de suivi environnemental sont indispensables.
L'opposition des riverains est une source de tension. Les nuisances sonores, les perturbations de la circulation et les expropriations éventuelles peuvent susciter la colère des habitants concernés. Une concertation étroite avec les riverains et des mesures d'accompagnement adaptées sont indispensables pour apaiser les tensions et garantir l'acceptation du projet. La transparence et la communication sont essentielles pour informer les riverains et répondre à leurs préoccupations.
Des alternatives au RER sont proposées, telles que le développement des transports en commun existants (métro, tramway, bus) et la promotion du covoiturage. Ces alternatives peuvent être complémentaires au RER, mais ne peuvent pas remplacer un réseau de transport en commun performant et adapté aux besoins de la région. L'intégration du RER dans une offre de transport multimodale est essentielle.
| Réseau de transport | Longueur du réseau (km) | Nombre de gares |
|---|---|---|
| Métro Marseille | 22.3 | 31 |
| Tramway Marseille | 15.8 | 32 |
| Futur RER Marseille (Phase initiale) | Environ 60 (estimation) | Environ 25 (estimation) |
Le RER marseillais : vers une mobilité durable ?
Le RER Marseillais représente un investissement d'avenir pour la mobilité, l'environnement et le développement économique et social de la région. La réduction de la congestion routière, la diminution des émissions de gaz à effet de serre et la création d'emplois sont autant d'arguments en faveur de ce projet d'envergure. En intégrant les objectifs de développement durable, le RER se positionne comme une solution pour répondre aux défis de la mobilité du XXIe siècle.
À long terme, le réseau pourrait s'étendre à d'autres villes de la région, créant ainsi un véritable réseau de transport en commun régional. L'innovation et la technologie joueront un rôle essentiel dans l'amélioration de l'efficacité et de l'attractivité du RER. Des systèmes de billetterie intégrés, des applications mobiles performantes et des services d'information en temps réel faciliteront les déplacements des voyageurs et encourageront l'utilisation des transports en commun. La collaboration avec les start-ups locales pour développer des solutions innovantes est une piste à explorer.
Marseille, grâce au RER, a le potentiel de devenir une métropole durable et attractive, où les déplacements seront fluides, rapides et respectueux de l'environnement. Le RER permettra de connecter les quartiers, de désenclaver les zones périphériques et de créer un sentiment d'appartenance à une communauté régionale forte et dynamique. Ce réseau constitue un levier pour façonner le visage de Marseille et de sa région pour les générations futures, en promouvant une mobilité plus durable, plus inclusive et plus efficace.
[1] TomTom Traffic Index 2022
[2] INSEE, Enquête Mobilité et Transports 2019
[3] Rapport d'orientation du projet RER Métropole Aix-Marseille-Provence
[4] Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET) de la Région Sud
[5] Communiqué de presse Région Sud, Lancement des études RER
[6] Délibération du Conseil Régional, Investissement transports
[7] Etude d'impact socio-économique du projet RER (source interne)
[8] Stratégie Régionale de Décarbonation, Région Sud
[9] Charte régionale emploi et formation RER
